Le soleil aux solstices : la porte du soleil de Mnajdra




Lever de soleil sur l'Acropole, antiquité grecque Ernest Renan.. Images regardsurlaplanete.com

En méditerranée, dans les îles de Malte et de Gozo, souvent en terrasse face à la mer, on peut admirer des vestiges millénaires de temples de pierre ouverts en plein ciel ; leurs murs d’enceinte englobent de larges cellules aux formes alvéolées, souvent quadrilobées. Aux équinoxes et aux solstices, le Soleil rasant y pénètre par des portes ou par des ouvertures nommées le trou de l’oracle.


Ici sur l’île de Malte, le Temple du Soleil de Mnajdra, une construction qui remonte à 3600 ans avant notre ère, avant les premières pyramides. 

Lorsque le soleil approche de l’horizon, sa lumière pénètre encore dans le temple par la porte d’entrée elle est stoppée par des baffles judicieusement disposées sauf aux solstices et aux équinoxes. Pour trois directions privilégiées, la lumière du soleil couchant pénètre au «chœur» du Temple et éclaire trois pierres sacrées : les jours des solstices d’été et d'hiver, les deux directions extrêmes, et lors des équinoxes de printemps et d'automne, la direction centrale, à l'ouest.

Le Soleil passe de la déclinaison - 23°5 au solstice d’hiver, tropique du Capricorne, à la déclinaison + 23°5 lors du solstice d’été, tropique du Cancer. L’angle projeté sur l’horizon est plus important, il dépend de la latitude du lieu. Pour les îles de Malte et de Gozo le Soleil se couche à 240°, à proximité du sud-ouest, lors du solstice d’hiver, et se couche à 300°, à proximité du nord-ouest, lors du solstice d’été

Les chicanes situées en arrière de la porte d’entrée réduisent la largeur de l’ouverture désormais une haute fente longiligne. 

Sur cette photo prise de l’intérieur du Temple de Mnajdra on aperçoit le Soleil à travers cette fente verticale. 

En haut à gauche les relevés topographiques effectués par l’archéologue Paul Micaleff, Union Print Co. Ltd, Malte 1992. 



Sur la pierre sacrée on aperçoit une bande lumineuse, aux deux bords nets, qui est une pseudo image du Soleil.

Dans le sens vertical l’éclairage s’étale sur toute la hauteur. 

Sur l’axe horizontal nous avons une «image» du Soleil donnée par la fente, de même que dans la chambre noire, souvent attribuée à Léonard de Vinci, c’est un trou de faible dimension qui donne une image du paysage. L’image est alors inversée mais sans aucune déformation du paysage. Léonard de Vinci se servait de cet «appareil photo» pour dessiner les paysages et respecter la perspective à la perfection. Des opticiens ont pu dire avec humour que le meilleur dispositif optique est celui qui est sans optique. Un trou, s’il est suffisamment petit, donne une image parfaite ; hélas ce système très diaphragmé est peu lumineux. Les appareils photos modernes, équipés de récepteurs CCD ultra sensibles, peuvent se permettre des objectifs d’entrée de petits diamètres, très diaphragmés, même en pénombre. 

Dans le temple de Hagar Qim, 3000 -2500 B.C. un «couloir du solstice d’été», borné de baffles latéraux, est situé dans l’axe du «trou de l’oracle». Peut-être la fenêtre d’entrée s’est-elle élargie sous l’effet d’un tremblement de terre. La forme curieuse de cette fenêtre est-elle délibérée? on ne comprend pas. Ce dispositif n’est pas davantage destiné à de l’astronomie. En raison de la réfraction astronomique les mesures effectuées sur l’horizon introduisent des décalages de quelques jours dans le calendrier des saisons et dans les azimuts des couchers du Soleil. Pour cette civilisation, le solstice d’hiver revêtait plus d’importance que le solstice d’été car cette «pierre sacrée d’hiver» est toujours sculptée, sans doute un hommage de respect adressé aux défunts.



L’hypogée de Hal Saflieni, à Malte, daté de 4100 avant notre ère, est une construction monumentale de 50 salles couvrant 2500 m2 sur 4 niveaux. Au début du XXe siècle on découvrit 7 000 squelettes dans cet hypogée appelé Temple de la Mort . A droite de l’image, sur le soubassement de la Porte du Soleil on voit les trois spirales de l’éternité que l’on a déjà vu au même millénaire sur le tumulus irlandais de Newgrange.

La chambre noire, instrument d’observation à l’œil nu du Soleil. 

Sur ce tableau célèbre, Crabtree observant le passage de Vénus devant le Soleil, la lumière pénètre dans la chambre obscure par une toute petite ouverture située à droite tandis que l’image du Soleil s’imprime sur l’écran blanc disposé à gauche sur l’un des abattants semi-circulaires de la table. Les regards des personnages et enfants sont tournés à l’opposé du Soleil ce qui demeure la meilleure méthode, pleine de bon sens, et assurément rusée, pour protéger la rétine d’accidents irréversibles. Aujourd’hui les médias vous stressent et vous «vendent»…lunettes spéciales… filtres de densités ou polarisants… systèmes optiques imageurs à diaphragmes pupillaires, … et vous poussent ainsi à regarder les éclipses en se tournant vers le Soleil une situation dangereuse à la merci d’un geste maladroit. 

C’est avec une chambre noire, et non avec un télescope, qu’en 1631 Pierre Gassendi, astronome et philosophe, observa pour la première fois le passage de Mercure sur le disque solaire. A la grande surprise de tous il mesura que le diamètre apparent de Mercure nommée trismégiste (très grand) n’était pas de 3’ d’arc comme on le croyait depuis toujours mais de 20’’d’arc seulement. Quelques années plus tard, en 1639, Crabtree observait un passage de Vénus devant le Soleil, phénomène encore plus rare qui ne se produit à chaque siècle. 

La chambre noire était-elle connue dans l’Antiquité ? Aujourd’hui, lors d’une éclipse de soleil, les astronomes amateurs utilisent les anciennes passoires percées d’une multitude de petits trous circulaires dont chacun projette sur le sol une image du Soleil, alors un croissant de Soleil

Plus naturel, à l’ombre d’un arbre assez touffu, avec toutefois bon nombre d’interstices, on voit se projeter au sol autant de petites images circulaires du Soleil ; lors des éclipses partielles de Soleil une multitude de «croissants» de Soleil apparaissent alors sur le sol. Dans l’Antiquité, la curiosité de cet ensemble artistique d’images pouvait-elle échapper à tous ? Cette situation soudaine et éphémère, quelques brèves minutes, n’aurait-elle pu provoquer les interrogations de quelques curieux et nourrir la réflexion de chercheurs ?