La mesure de la hauteur du Soleil au solstice d'été




A Marseille, la longueur de l’ombre à l’équinoxe est de 113 divisions, pour un gnomon de120 divisions de hauteur.
Le soleil est alors situé au dessus de l’horizon à un ‘’angle’’, marqué en bleu, dont la ‘’tangente’’ est 120 sur 113.
La valeur de cet angle, nommé la ‘’co-latitude’’, est 46°43’ 15’’.
La ‘’latitude ‘’, hauteur du pôle au-dessus de l’horizon, est l’angle complémentaire 43°16’45’’.

Latitude de Marseille
Aujourd’hui on retrouve ce rapport 120/113, hauteur du Soleil à l’équinoxe, mesuré il ya 2300 ans à Marseille par Pythéas, dans l’Histoire de la mesure du méridien terrestre (fig. 2, page.119) qui est un ouvrage pédagogique des éditions universitaires « ellipse » destiné aux élèves de l’enseignement primaire. Les enfants apprennent à l’occasion de cet exemple à utiliser la touche ‘’tangente’’ d’une calculatrice scientifique afin d’en connaître l’angle et d’en déduire la latitude ; premier balbutiement vers les fonctions trigonométriques. Un complément pratique pour les enfants serait de joindre à ce calcul moderne la méthode de projection graphique sur le sol utilisée par Pythéas et Eratosthène, à la manière d’Euclide, traçant sa géométrie courbé vers le sol comme sur la célèbre fresque de l’Ecole d’Athènes de Raphaël.

Statue de Pythéas le Massaliote, sur la façade du Palais de la Bourse au bas de la Canebière, réalisée en 1860 par Auguste Ottin, grand Prix de Rome. En mémoire des origines grecques et celtiques de Massalia, Ottin a représenté Pythéas vêtu du manteau grec et des braies gauloises. A ses pieds un phoque symbole des mers polaires découvertes par Pythéas lors de son périple jusqu’en Thulé mais aussi un rappel de Phocée, la cité mère. Le nom de Phocée vient de phoque. Nil Seral*, 1993, rappelle que ce mammifère marin des mers froides descend encore du Pont-Euxin (mer Noire) par le détroit du Bosphore, traverse la Propontide (mer de Marmara), franchit l’Hellespont (détroit des Dardanelles) et longe les côtes d’Asie mineure jusqu’aux îles situées en baie de Phocée. Un phoque figurait à l’avers des pièces de monnaie phocéennes. Seral Nil, All the warmth of the Aegean : Foça, in Cityscope, september 1993.

A la suite de la conquête du Péloponnèse par les Héraclides, les rivages de l’Asie Mineure, l’Ionie, se couvrirent cités grecques formant une association politique dont les députés s’assemblaient dans un sanctuaire sacré, le Paniônion, situé sur la face Nord du Mont Mycale et vis-à-vis de l’île de Samos où l’on célébrait le culte de Poséidon comme nous apprend Homère. De ces cités on a aujourd’hui conservé le souvenir d’ «Ephèse, célèbre par son temple, son opulence et son luxe… de Phocée qui les éclipsa toutes par la hardiesse de ses navigateurs, par sa puissance maritime » (Augustin Fabre, Histoire de Marseille, 1829). Citons en mer Egée l’île de Chios où naquit Homère… Milet patrie du Thalès… l’île de Samos où naquirent Pythagore qui montra que la terre était ronde puis Aristarque qui détermina la distance du Soleil… enfin la presqu’île de Cnide où Eudoxe établit le premier modèle prédisant le mouvement des planètes …et, sur la côte sud de l’Anatolie, l’île de Rhodes dont la notoriété est due à sa statue en bronze du dieu Hélios et à la renommée de ses savants Eratosthène, Posidonius, Hipparque et Géminos. (voir carte mer Egée)
Phocée, en raison de son terroir stérile, ne pouvait suffire à la nourriture de ses habitants ; ils s’adonnèrent au commerce maritime (Justin, liv. XLIII). Du temps d’Homère et d’Hésiode, les Phocéens étaient parvenus à un haut degré de prospérité, ils furent les premiers des grecs qui entreprirent de longues courses, les premiers qui leur firent connaître la mer Adriatique, la mer Tyrrhénienne et les côtes de l’Ibérie (Hérodote liv. I, §163, & Appian de Bello hispan.). Ils établirent leurs comptoirs en Sicile, en Gaule (Massalia), en Ibérie (Emporion), en Corse (île de Cyrné), en Calabre (Reggio) en Campanie (Hyélé). Leurs vaisseaux, rivalisant avec ceux de Tyr, franchirent mêmes les Colonnes d’Hercule.
Il est probable que les Phocéens fréquentèrent de bonne heure les côtes des Gaules et surtout les bouches du Rhône si favorables à leur commerce. Quelques–uns de leurs navigateurs, revenant de ces contrées, en vantèrent la beauté, et engagèrent plusieurs de leurs compatriotes à y conduire une colonie (Justin, liv. XLIII). Le Sénat fit aussitôt équiper une flotte. C’était l’usage de consulter les dieux dans les expéditions importantes. Suivant Strabon (liv. IV, 1, 4), l’Oracle répondit de prendre pour chef celui que Diane d’Ephèse désignerait. Après cette réponse, la flotte mit à la voile sous le commandement de Simos et de Protis, et alla à Ephèse* prendre les ordres de la déesse (Justin, liv. XLIII) (image mer Egée). « Durant la nuit qui suivit l’arrivée des Phocéens, Diane se montra en songe à Aristarché, l’une des dames les plus considérées de la ville, et lui ordonna de prendre une de ses statues et de suivre les Phocéens (Strabon (liv. IV, 1, 4). Aristarché obéit et monta sur leurs vaisseaux qui vinrent jusqu’à l’embouchure du Tibre. Tarquin l’Ancien, -616 -578, régnait alors sur les Romains. Ce prince, originaire de Corinthe, aimait tous les peuples de Grèce. Les Phocéens firent alliance avec lui, remirent à la voile, et abordèrent bientôt aux rivages de la Gaule, dans un golfe écarté et comme un recoin de la mer. Quand les colons atteignirent le terme de leur expédition, ils bâtirent le sanctuaire et honorèrent Aristarché de la plus haute dignité en la faisant prêtresse (Justin, liv.XLIII).
Alliance avec Rome mais rivalité maritime avec Carthage. Thucidide (Liv. I) et Pausanias (in Phoci) précisent « les Phocéens en fondant Marseille, battirent sur mer les Carthaginois, …occupèrent les terres qu’ils possèdent et devinrent très florissants ». Strabon ajoute que de son temps le temple de Diane était rempli de dépouilles enlevées dans ces batailles navales/, et Pausanias assure que les Marseillais, après un combat glorieux contre les Carthaginois, envoyèrent au temple d’Apollon à Delphes une statue de ce dieu, comme les prémices de la victoire.
Eusèbe, dans sa Chronique, dit que « Marseille fut fondée l’an 1er de la 45e olympiade (en -600) ». Scymnus Chius dans sa petite Géographie en vers vient appuyer cette date en disant qu’elle « fut fondée 120 ans avant la bataille de Salamine qui eut lieu la 4e année de la 74e olympiade » le calcul, avec une olympiade tous les quatre ans, aboutit à 599 B.C.



En 1905 dans un article intitulé La prise de Phocée par les Perses, (www.persee.fr Revue des Etudes Grecques, pp143-158) le grand historien Michel Clerc, après une analyse serrée des textes d’Hérodote et d’Antiochos de Syracuse, premiers témoins de ces événements, put affirmer : « Il faut donc renoncer absolument à l’hypothèse d’une seconde colonisation phocéenne à Massalia, soit immédiatement après la prise de Phocée, soit quelques années après la bataille d’Alalia (Aleria, Corse) ».
Ce commentaire d’Hérodote, d’une grande clarté, est fascinant, … la prise de Sardes en 546 avec la mise en déroute de l’excellente cavalerie lydienne de Crésus affolée par l’odeur des chamelles que Cyrus, roi des Perses avait fait placer en tête de ses troupes, puis un bref siège de 16 jours…les Phocéens qui recherchent en vain l’appui de Spartes… les Lacédémoniens refusent de se soumettre à Cyrus …seule exception parmi les cités ioniennes, Milet put s’entendre avec le roi de Perse… alors que Cyrus s’engage à l’assaut de Babylone il confie à son fidèle général, le Mède Harpagos la conquête des cités ioniennes… après la prise rapide de Priène l’armée Perse passe de la vallée du Méandre à celle de l’Hermos pour assiéger Phocée (en 540), cité la plus redoutable …plus de la moitié des citoyens se soumettent et « ceux qui le pouvaient et leur famille » se dirigent vers Alalia (Aleria) comptoir fondé dans l’île de Cyrnée (Corse) en 560… cinq ans plus tard, 535 au moins, ces nouveaux Phocéens fugitifs doivent faire face à une coalition des Carthaginois et des Etrusques basés à Agylla (grande banlieue de Rome) et vis-à-vis direct d’Alalia…la grande bataille navale entre les flottes étrusques et carthaginoises qui disposaient chacune de 60 navires 120 en tout, et les Phocéens qui n’avaient pu en armer que 60, se déroule en mer de Sardaigne, à l’ouest ou au sud-ouest de l’île. Quarante vaisseaux Phocéens sont coulés. Les rescapés rentrent à Alalia, embarquent précipitamment femmes et enfants, quittent définitivement la Corse et font voile vers Reggio de Calabre. « Ce ne fut pas encore la fin de leurs tribulations. De Reggio ils allèrent jusqu’en Lucanie, près des frontières de la Campanie, et là ils fondèrent enfin une ville destinée à une grande célébrité, Hyélé, plus connue sous les noms de Eléa ou Vélia » (Michel Clerc 1905)

« La ville de Massalia, précise Strabon, est une fondation phocéenne. Elle occupe un terrain rocheux et son port s’étale au pied d’une ‘’falaise en amphithéâtre’’ orientée face au sud et munie de solides remparts » ; il s’agit de l’arc formé par trois collines, les buttes de Saint Laurent, des Moulins et des Carmes qui dominent, au nord, le Vieux-Port.
Strabon précise que dans la citadelle « s’élèvent l’Ephésium et le sanctuaire d’Apollon Delphinien. Le culte de cet Apollon est commun à tous les Ioniens, tandis que l’Ephésium est le temple d’Artémis qu’on révère seulement à Ephèse ». La tradition situe ces deux temples le long du promontoire rocheux occidental, de la butte Saint-Laurent (temple d’Apollon) à l’ancienne cathédrale de la Major (temple d’Artémis).
La maquette du musée d’Histoire montre également un troisième temple, « possiblement d’Athena Polias » (Inrap), au sommet du roc des moulins la plus haute des 3 collines, altitude 42m, et probablement l’acropole. C’est là qu’au 17e siècle fut érigé l’Observatoire des Accoules aujourd’hui Ecole primaire de ce quartier typique de Marseille. Ce haut bâtiment était surmonté d’une coupole abritant un télescope de 40cm de diamètre alors le plus grand de France. Comme le précise la plaque commémorative de la montée des Accoules, l’astronome Jean-Louis Pons y découvrit, avec une modeste lunette, 37 comètes, record mondial de tous les temps.
Outre ces trois temples, la maquette montre un ensemble de bâtiments imposants, probablement l’agora, à l’emplacement de la place de Lenche, là où saint Cassien fonda, en 420, l’abbaye de Saint-Sauveur. En 1696, Antoine de Ruffi fait état, sous cette abbaye, de la découverte de grottes souterraines remontant à l’époque romaine ; un siècle plus tard Jean-Baptiste Grosson précise qu’il s’agit de sept salles voutées alors considérées comme des citernes d’eau potable ; en 1841, ces caves de Saint-Sauveurseront classées monument historique. L’édifice comporte un long couloir voûté de 41m de long par 4 m de large et 7 chambres identiques juxtaposées de 10m40 de long par 5m de large avec voûtes démarrant à 7m50 de hauteur et atteignant 10m à l’apogée. Les fouilles entreprises depuis 1977 ont permis à Henri Tréziny* de préciser qu’il s’agissait de salles de stockage pour maintenir au sec les céréales et marchandises mais aussi les gréements, bois, cordes et toiles nécessaires aux navires. Tréziny* a montré qu’avant même la construction de ces caves, deux siècles avant notre ère, devaient exister deux immenses plateformes l’une supérieure, l’agora,place de Lenche, 14 à 15 m au-dessus du niveau de la mer, l’autre terrasse inférieure, vers 3 m, un forum rythmé de portiques et couvert de grandes dalles.


« Dès la soixantième Olympiade, 540 B.C., les Massaliotes avaient bâti le temple d’Artémis où officiait la Prétresse Aristarche, femme d’Ephèse extrêmement respectable » (Strabon). Au temps de Pythéas, IVe siècle, Massalia, comme toutes les cités grecques de renommée intellectuelle et économique avait un gnomon horologium sur une place publique fréquentée afin que tous aient accès à l’heure mais aussi connaître le calendrier c’est-à-dire les 12 mois du zodiaque et les 4 saisons qui rythment les activités maritimes et agricoles.

On peut imaginer le gnomon de Pythéas comme une colonne, identique à celle d’un temple, de 4, 5, 6 voir 7m de hauteur, dressée sur une terrasse dont le sol est quadrillé de lignes droites convergentes qui indiquent les heures équinoxiales, ces lignes entrecroisent 3 hyperboles concaves, la ligne droite des équinoxes et 3 hyperboles convexes qui déterminent les 12 mois du zodiaque et les dates des équinoxes et solstices. Une terrasse de dimension fort raisonnable pour cette cité : 20 par 24m pour un gnomon de 4m de hauteur… jusqu’à 35 par 42m pour 7m de hauteur. On peut en conclure que les buttes escarpées de Saint Laurent et des Accoules étaient peu propice, tandis que le temple d’Artémis, site de la Major, sur un esplanade bien dégagée de la mer à cette époque, se présentait de manière idéale au même titre que l’agora, place de Lenche, que nous venons de décrire.

Si le niveau de la mer n’a guère changé depuis l’époque de Pythéas comme l’ont montré les fouilles de la Bourse, la topographie du rivage fut chamboulée. En 1902 J.V. Martin estimait que lors du siège du César la mer était éloignée de plusieurs centaines de mètres du rivage actuel, du temple d’Artémis. Comme le montre la carte de Desmaret 1802 le rocher de l’Esteou n’était pas encore isolé par la mer, et l’anse de l’Ourse n’avait pas encore été creusée par l’érosion marine. Plus précis encore, Martin montrait qu’entre 1202 et 1802 l’anse de l’Ourse recula de 78m envahissant la Place de l’Observance, franchissant la rue de la Trinité-Vieille et isolant son église située au nord de cette rue, de la Major située au sud. La gravure d’Ismael Silvestre montre un parapet qui protége le parvis de la Major de la mer.

En 1850, lors du chantier de construction de la nouvelle cathédrale, à proximité de l’ancienne, les propriétaires des lieux mirent au jour les vestiges d’un bâtiment octogonal constitué sur une embase de 23x23m de 16 colonnes de 8m de hauteur dont 8 devaient supporter un dôme surplombant une piscine de 4m40 de diamètre avec mosaïques romaines. Hélas il ne s’agissait pas du temple d’Artémis d'Héphèse mais d’un Baptistère chrétien datant du Ve siècle. Les fouilles exhaustives furent alors engagées dans les règles de l’art par les architectes Feautrier, Espérandieu et Vaudoyer et poursuivies jusqu’en 1904 par François Roustan* et son équipe d’archéologues qui découvrirent quatre chapiteaux de marbre de Paros à proximité du baptistère et une colonne de marbre dont les ornements gravés sur le fût sont datés du 15e siècle mais colonne considérée comme antique « en raison de la finesse du grain et de la couleur du marbre » Roustan, 1878. Cette colonne antique de 10 m de hauteur a été dressée au centre de l’autel de Saint-Lazare dans une nef latérale de l’actuelle Major. On sait que lors de l’immigration phocéenne les navires grecs avaient un tonnage permettant d’embarquer les familles et statues des dieux ; peut-on, dès lors, imaginer qu’au IVe siècle des navires de commerce auraient pu transporter une colonne de x m qui aurait été dressée sur une place publique associant la beauté artistique d‘un marbre et la Connaissance des Temps chère aux astronomes.

François Roustan, 1904, La Major et le premier baptistère de Marseille et 1994, réédition illustrée du C.P.M. par Marcel Petit, accompagnée de planches couleur des mosaïques romaines (livre rare)

Les almanachs des P et T précisent non seulement le jour des équinoxes, mais aussi l’heure, la minute et la seconde de ces deux instants privilégiés où le Soleil traverse l’équateur céleste (déclinaison delta=0 en coordonnées équatoriales). Les équinoxes pouvant se produire aussi bien de nuit que de jour, toute mesure de la longueur de l’ombre effectuée au méridien, à midi, sera fatalement inadaptée. On sait qu’en période d’équinoxes la durée du jour augmente, ou se réduit, de 4 minutes d’un jour à l’autre. Aux équinoxes le Soleil est dans les signes du Bélier ou de la Balance où l’écliptique fait l’angle maximum (23°5) avec l’équateur, alors qu’aux solstices, dans le Cancer ou le Capricorne, l’écliptique était parallèle à l’équateur. La déclinaison du Soleil, c’est à dire sa distance à l’équateur, change rapidement lors des équinoxes: 24’ minutes d’arc d’un jour à l’autre, soit les 2/3 du diamètre solaire. Un nombre facile à retenir, 1’ d’arc par heure.
La ligne droite des équinoxes, ligne Est-Ouest (ici tracée en noir) est l’intersection entre le plan équatorial passant par le sommet du gnomon et le plan horizontal où se projette l’ombre.
La figure ci-jointe présente le cas d’un équinoxe de printemps pour lequel le Soleil traverse la ligne des équinoxes à 8 heures du matin et un équinoxe d’automne où l’événement a eu lieu en cours de nuit ; on peut toutefois, par interpolation, estimer si le Soleil a franchi la ligne d’équinoxe en début, milieu ou fin de nuit. La trace de l'extrémité de l’ombre en cours de journée est donc légèrement inclinée par rapport à la ligne droite des équinoxes : dans un sens à l’équinoxe de printemps, dans l’autre sens à l’équinoxe d’automne. La concavité et la convexité de ces courbes se manifeste très vite.
La ligne droite des équinoxes est tracée lors de la mise en service du gnomon. Heure après heure, on marque sur le sol la longueur de l’ombre ; on répète l’opération pendant les jours qui précèdent et qui suivent. Par symétrie on renouvelle l’opération à l’équinoxe suivant où l’inclinaison est inversée.



L’anneau équatorial d’Hipparque est un cercle métallique plat, gradué, de section rectangulaire. On mesure la projection de l’ombre de la demi-portion supérieure exposée au Soleil sur le flanc de la demi-portion circulaire basse qui lui est opposée. A l’heure de l’équinoxe cette partie intérieure basse se trouve momentanément dans l’ombre. Hipparque signale qu’une année, à l’équinoxe, il vit à deux reprises l’ombre se projeter sur la partie basse de son anneau équatorial. ‘’Une observation erronée’’ tranchera Ptolémée trois siècles plus tard.
Pourtant, Hipparque, excellent observateur qui innova avec ses armilles méridiennes et équinoxiales, ne s’était pas trompé. L’anneau d’Hipparque n’était pas en cause.
A la fin du XVIe siècle, ‘’Tycho Brahé fut victime à plusieurs reprises de la même singularité. Sûr de son habileté et de la précision de ses instruments Il ne pouvait admettre une telle explication. Il en signala la véritable cause dans la réfraction des rayon lumineux qui, nulle au zénith, prend à l’horizon sa plus grande valeur ; lors donc que le soleil est le matin un peu au-dessous de l’équateur, la réfraction peut, en relevant ses rayons, faire croire à l’observation de l’équinoxe’’. Bertrand 1863, Eloge de Képler.
Pline rapporte l’observation mystérieuse d’ ‘’une éclipse de Lune qui eut lieu alors que le Soleil était encore au-dessus de l’horizon’’. La Lune disparut par conséquent sans que la ligne droite qui réunit son centre à celui du Soleil parût rencontrer la Terre. La réfraction, qui relève les deux astres, explique leur présence apparente et simultanée au-dessus de l’horizon. Bertrand 1863, Eloge de Képler.
« De manière inexacte Tycho Brahé pensait que la réfraction des étoiles s’annulait à 20° de l’horizon et que celle du Soleil, plus considérable, ne devenait nulle qu’à 45°…Le grand mérite de Képler, affirme Bertrand, est d’avoir établi les premières tables de réfraction atmosphérique …précises à mieux que 9’’ seconde d’arc jusqu’à 20° au dessus de l’horizon… les écarts deviennent plus considérables au dessous de 20°. Descartes reconnaît expressément tout le parti qu’il en a tiré ». Bertrand 1863, Eloge de Képler.

Carte d’Eratosthène interprétée par Gosselin 1814, Bibliothèque Nationale de France

C’est la première carte géographique du monde habité graduée en coordonnées, longitude, sur 360°, latitude, sur 90° Nord et Sud. Les distances, évaluées en stades, étaient mesurées par les bématistes, arpenteurs qui comptaient le nombre de pas en accompagnant les caravanes. Connaissant le nombre de stades entre Syène et Alexandrie, Eratosthène calcula la circonférence de la Terre à l’équateur, 252.000 stades, à partir de la longueur de l’ombre au solstice d’été qui était nulle à Syène (au fonds d’un puits) et un cinquantième de circonférence (7°2 par rapport au zénith) à Alexandrie. L’échelle est de 700 stades par degré.

A la même longitude que Rhodes, Eratosthène positionne Méroé, Syène, Alexandrie (7°2), l’Hellespont (détroit des Dardanelles), Byzance, le Borysthène (l’embouchure du Dniepr). Aux parallèles passant par ces six repères Eratosthène ajoute le cercle polaire, latitude 66°8, la Thulé de Pythéas où le soleil au solstice d’été vient raser l’horizon. Outre les latitudes précises, mesurées avec un gnomon, comme celle d’Alexandrie et Syène, située sous le tropique, 23°8, Eratosthène reporte la latitude de Marseille mesurée avec grande précision par Pythéas. Les latitudes d’Athènes et de Rome déterminées par l’azimut des levers et couchers du Soleil au solstice d’été sont moins précises. Les textes précisent qu’à Athènes le rapport entre les secteurs d’horizon Nord et Sud sont alors de 3 et 5, estimation assez grossière de la latitude.

A la latitude de Rhodes, au delà des colonnes d’Héraclès, Ératosthène situe le Promontoire Sacré, Hieron signalé, un siècle avant Pythéas, par l’explorateur carthaginois Himilcon comme Pline et Aviénus nous le rapportent.

A 48° de latitude Eratosthène signale l’avancée à l’ouest de la celtique, le Promontoire Kabaïon (ici latinisé en Calbium) 3 degrés au delà du Promontoire Sacré alors qu’il est en retrait de 4 degrés. D’Arbois de Jubainville*, helléniste et premier titulaire de la chaire de langue et littérature celtique au Collège de France a identifié le cap Kabaïon d’Eratosthène avec la pointe de Penmarc’h, nom breton francisé en cap Caval, située à la pointe sud du Finistère. Kaballes en grec signifie cheval. En langue celtique penn signifie tête et marc’h cheval.
*Arbois de Jubainville, (Henri d’), 1902, Pythéas, in Cours de Littérature celtique, tome XII, pp.63-77.



Sur la carte du périple de Pythéas, reconstituée par Gaston Broche, nous avons reporté quatre latitudes fondamentales déterminées par Pythéas à partir de la hauteur du Soleil au solstice d’hiver, et rapportées par le célèbre Hipparque deux siècles plus tard. Il s’agit de deux promontoires le cap Kabaion, notre pointe de Penmarc’h, et le cap Orcas, face aux Orcades britanniques, de l’archipel des Hemodes, les Shetlands, et de la ‘’limite entre les peuples Celtes et les Scythes’’, qui était, pour Eratosthène et Hipparque, l’embouchure de l’Elbe (à la base de la presqu’ile du Jutland) comme l’a montré Hugo Berger* (1869 et 1880).
Sur cette carte, avec quatre secteurs de couleur rouge d’angles différents et des petits soleils, nous avons reporté ces hauteurs du soleil hivernal au-dessus de l’horizon mesurées par Pythéas :
- 18° pour le cap Kabaion (Penmarc’h), (lat. = 48°2)
- 8° pour le cap Orcas (lat. = 58°2)
- 5°5, ‘’moins de 3 coudées pour les lieux qui sont au delà’’, pour les Hemodes (Shetlands) (lat.=60°7)
- 12° pour l’embouchure de l’Elbe (lat.=54°2).
Quatre résultats à mieux que 1°, on ne peut attendre meilleure précision avec cette méthode. Pythéas signale en outre que le jour le plus long est de 18 heures au cap Orcas et de 19 heures aux Shetlands ; ces mesures de l’azimut des levers et couchers de Soleil viennent conforter l’exactitude de ces deux dernières latitudes.
En couleur verte nous avons reporté, en stades, les distances parcourues par Pythéas, à pied à moins que ce ne soit à cheval, dans la grande île Prétannique durant les longs hivernages où la navigation maritime était impossible ; pour le moins entre les équinoxes d’automne et de printemps. Diodore de Sicile (~90 ~10), qui le tient du livre de Pythéas, cite entre les caps Belerion, Kantion et Orcas des distances de 7.500, 15.000 et 20.000 stades. En couleur bleu, les distances en journée de navigation.
‘’Six jours’’ de navigation du cap Orcas à l’Islande selon Strabon, ce qui est confirmé par les trajets vikings qui nous sont rapportés.
’’Six jours’’ pour rejoindre l’île d’Ictis, en baie de Penzance, à partir du Cap sacré selon Timée de Tauromenion (de Taormine) contemporain de Pythéas. ‘’Trois jours’’ pour atteindre ‘’le cap Kabaion (pointe de Penmarc’h), et les îles qui sont près de lui, dont la dernière est Uxisama (Ouessant)’’ à partir de la côte des Artabres Berger Hugo, 1869, Geographischen fragmente des Hipparch, pp.68-71, & 1880 Geographischen fragmente des Eratosthenes pp.148-149 & p.213 Leipzig https://books.google.mw

La carte d’Eratosthène dessinait, du cap Sacré au cap Kabaion, une côte continue, courbée vers le nord-ouest. Deux siècles plus tard Strabon a le mérite de situer le point clé de la navigation hauturière, le Promontoire des ArTabres, cap Finisterre ibérique, situé à l’extrême ouest de la chaîne des monts CanTabriques qu’il trace correctement, d’Ouest en Est, de la Galice à la Navarre. Ce tournant radical de la côte, à 90°, sépare la route des marins qui naviguent au grand large vers les îles Cassitérides, de ceux qui pratiquent le cabotage vers nos îles atlantiques et commercent vers la Garonne, la Charente, la Loire et la Vilaine où serait située la ville commerçante de Corbilo (Pennestin, pointe de l’étain) dont parle Polybe à propos de ses mines d’étain citées par Pythéas ; au dire de cet historien, Scipion Emilien y aurait été envoyé pour vérifier les informations de Pythéas. Malheureusement Strabon tracera les Pyrénées en direction Sud-Nord et la pointe bretonne se retrouvera à la longitude-nord de Marseille. Le célèbre Ptolémée, astronome et géographe, distinguera l’Océan Cantabrique (golfe de Gascogne) de l’Océan Occidental, et remettra la pointe bretonne et les îles britanniques à la bonne longitude.
A l’exception des Phéniciens, et de massaliotes comme Euthymènes puis Pythéas, bien peu osaient affronter l’Océan sinon accompagnés de pilotes. Cette élite professionnelle ayant une ‘’mémoire ancestrale’’ des amers, écueils, courants, marées et mouillages naviguait chacun sur les itinéraires de sa compétence, presque à l’instinct, attentifs aux algues dérivantes, aux zones de pêche ou migration des oiseaux. Au cours de sa navigation nocturne Pythéas connaissait à 1 degré près la direction du pôle, et, de jour, avec un scaphidium (petit Scaphé solaire) il avait le nord à mieux que 15° ; ainsi, en géographe, il pouvait reconstituer l’itinéraire (azimut et distance) suivi par ces pilotes avec qui il avait su sympathiser.
Afin d’éviter d’être poussé par les vents d’ouest dans le golfe de Gascogne, les Instructions nautiques du XIXe siècle recommandaient, en appareillant du cap Finisterre, de cingler* au grand large jusqu’aux longitudes de dix et douze degrés.
Sur l’image nous avons regroupé les trois caps majeurs Nerium, Kabaion et Belerion extraits de la Cosmographia de Claude Ptolémée, œuvre colossale de 27 cartes en couleur de 56x42cm, dans la très belle édition artistique de la Bibliothèque Nationale de Naples à partir d’un manuscrit du 15ième siècle (ici réédition restreinte Hier et Demain 1976).
A l’ouest du territoire des Artabres, Ptolémée indique le Promontoire Nerium, cap Finisterre de Galice par 242 m d’altitude. De l’autre côté de la baie de Corcubion, abritée des vents dominants, le monte Pindo, 627m d’altitude et en bordure de mer ; c’est le repère providentiel des marins, visible du grand large. Ptolémée indique à proximité immédiate de la côte, les mythiques Cassitérides toutes petites et au nombre de 10, selon la description de Strabon ; il les représente de dimension nettement inférieure à celle des deux îles situées à l’entrée des rias de Arousa et de Pontevedra.
A la pointe de l’armorique, territoire des Ostimii, Ptolémée situe le cap Kabaion, c’est la pointe de Penmarc’h/ nous l’avons dit. La carte marine du XIXe montre les roches perfides, recouvertes au gré des marées, qui en interdisent l’accès ; Benodet est un mouillage recommandé. De même à Uxisama, Ouessant, cité par Pythéas, la crique et plage de Porz-ar–lan abritée des vents dominants était le mouillage utilisé dans l’Antiquité, les archéologues bretons y ont mis au jour une épave de l’époque romaine.
Les îles Cassitérides étaient les îles Scilly (Sorlingues) à la pointe des Cornouailles anglaises. Ptolémée distingue le Promontoire Belerion, le Lands’end, et le Promontoire Dumnonium, le cap Lizard, qui encadrent la ‘’baie de Penzance’’ où se situe l’île d’Ictis qui est le Saint Michael’s Mount : « A marée basse, le passage étant à sec, ils transportent dans cette île, sur des chariots, de grandes quantité d’étain…à marée haute, le passage se remplissant, elles font l’effet d’être des îles… C’est de là qu’ils font transporter cet étain en Gaule’’. Diodore de Sicile, V, 22.
*cingler, terme de marine venant de l’ancien scandinave sigla : faire voile dans telle ou telle direction.
Gosselin P. F. , 1813, Recherches sur la géographie des Anciens, tome quatrième, pp.39-40. Imprimerie Impériale, Paris. https://books.google.fr



La première méthode qui fut utilisée pour déterminer la latitude d’un lieu était basée sur la durée du plus long jour de l’année, le solstice d’été. Eudoxe*, début du 4ième siècle, l’astronome le plus brillant de son siècle, ouvrit la voie à cette méthode, suivi par Pythéas qui l’utilisa à plusieurs reprises lors de son périple… des jours de plus en plus longs à l’approche des latitudes nordiques…une durée de 22 heures dans l’archipel des Shetlands, et de 24 heures à Thulé, où le Soleil ne se couche pas au solstice d’été.
L’usage du gnomon était connu depuis Thalès qui le premier l’utilisa pour déterminer les dates des solstices et des équinoxes mais il fallut attendre Eudoxe pour mesurer directement les latitudes:« à Cnide, dit-il, le jour de l’équinoxe, le rapport de la hauteur du gnomon à la longueur de l’ombre est de 4 à 3 » nous rapporte Hipparque ; le gnomon que Pythéas dressa à Marseille était plus précis, 120 divisions de hauteur soit 3 chiffres significatifs. Hélas Strabon ne nous a pas transmis la longueur de l’ombre mesurée à Marseille à l’équinoxe, intéressante pour la géographie, mais il a sauvé deux mesures que Pythéas effectua au solstice d’été, l’une la longueur de l’ombre à midi & l’autre la durée entre le lever et le coucher du Soleil le même jour. Ces deux mesures indépendantes incluant l’obliquité de l’écliptique sont essentielles pour l’astronomie, car cet angle oscille lentement au cours des siècles en raison de l’action de Jupiter et de Saturne ce qui modifie l’orbite de la Terre, donc son ensoleillement, et engendre des cycles climatiques millénaires.
Comment Eudoxe réussit-il à déterminer la latitude d’un lieu à partir de la durée du jour ? Ce problème ardu de trigonométrie sphérique sera résolu en toute rigueur au 19e siècle par Gauss. Hipparque, dans son commentaire sur le Miroir d’Eudoxe, nous explique qu’Eudoxe avait un globe, mobile autour du pôle, dont le cercle méridien était gradué en degrés et le cercle équatorial en 24 heures ; en changeant l’inclinaison de l’axe polaire sur le plan horizontal, on pouvait déterminer la durée du jour à toutes les latitudes.
Dans cet ouvrage, au titre habilement choisi, Katoptron, miroir, Eudoxe, astronome et géographe, s’adresse aux navigateurs qui veulent pour connaître l’heure aux étoiles durant la nuit. Il explique que les cercles mathématiques, virtuels, longitude & latitude tracés sur la Terre, sont l’image, ‘’le miroir’’ des cercles ascensions droites & déclinaisons tracés dans le Ciel ; pôle terrestre & pôle céleste; équateur terrestre & équateur céleste. Par exemple, concernant les points de passage du tropique d’été, Hipparque rapporte les paroles d’Eudoxe « sur ce cercle est le milieu du Cancer…un peu au-dessus de la Vierge, …la main droite de l’Homme à genoux, la tête d’Ophiucus, le cou du Cygne, son aile gauche et les pieds du Cheval (aujourd’hui Pégase), la main droite d’Andromède, entre les pieds de Persée, sur son épaule gauche…les têtes des Gémeaux et revient au milieu du Cancer ». Hipparque promet une exposition exacte des levers et couchers, il dira surtout quelles sont les étoiles qui déterminent les 24 espaces horaires. Delambre, 1817, pp.107-110.
A la lecture de ce catalogue stellaire de plus d’une centaine d’étoiles, difficile à mémoriser on comprend le succès de Phénomènes et Prognostics le poème d’Aratos de Soles: « Quand le Soleil commence à marcher avec le Lion, c’est alors que les champs sont vides d’épis, c’est alors que les vents étésiens se précipitent en foule vers la mer, c’est alors que l’on ne navigue plus à la rame, qu’il faut des vaisseaux ventrus et que le pilote est obligé de consulter le vent ». Autre exemple d’Aratos « les mouvements du Cheval (aujourd’hui Pégase) sont rapides ainsi que ceux du Bélier » en effet, ces deux constellations sont proches de l’équateur où la vitesse angulaire est la plus rapide, 15° sur le Ciel à chaque heure, elles sont sur le même parallèle (déclinaison vingt degrés) ce qui explique égalité de vitesse.
Avec les géographes regardons l’image, le miroir, d’un parallèle sur la Terre avec l’exemple de la latitude de Rhodes, 36°, dont Ératosthène fit la base de sa géographie. Ce cercle virtuel part de l’embouchure du Gange passe par les Portes Caspiennes, l’embouchure de l’Euphrate, le Mont Taurus, Rhodes (où observèrent Hipparque, Posidonius et Geminos), le Détroit de Sicile, les Colonnes d’Héraklès et le Promontoire Sacré.


Le poète Aratos de Soles, -315 -245, avait suivi à Athènes l’enseignement de Persaios, philosophe stoïcien et disciple de Zénon, qui l’amena à la cour d’Antigone Gonatas, roi de Macédoine qui résidait à Pella. La légende rapporte qu’Antigone lors de son mariage avec Phila aurait offert à Aratos le Katoptron écrit par Eudoxe, lui demandant de l’adapter en vers.
La phrase ci-jointe d’Hipparque, si simple avec ses nombres ronds, « le tropique du Cancer y est coupé par l’horizon en deux parties qui sont comme 5 et 3…ou comme 15 et 9… le jour par conséquent est de 15 heures, et la nuit de 9 heures » a pour premier mérite de montrer que ce n’est ni avec une clepsydre ni avec une horloge que l’on mesurait la durée du jour et que cet inventaire du ciel, mémorisé par ce poème, permettait même aux marins de connaître l’heure la nuit. De ces valeurs, « le jour 15 heures, la nuit 9 heures » Hipparque conclut que la latitude était de 41°. Delambre qui refit le calcul par la trigonométrie sphérique obtient 40°52’ latitude qu’il juge convenir avec celle de Pella en Macédoine, 40°45’ où Aratos demeurait.
Mais revenons aux mesures redondantes de la latitude de Cnide par Eudoxe de Cnide « C’est une chose reconnue, affirme Hipparque dans son Commentaire, que le rapport de la hauteur du gnomon à la longueur de l’ombre à l’équinoxe est celui de 4 à 3 (soit lat.= 36°52’), que le plus long jour, au solstice d’été, est de 14h2/3 presque (soit lat.= 36°46’*), et la hauteur du pôle = 37° ». Eudoxe avait établi son observatoire à Cnide (latitude de 36°43’) sur la presqu’île turque de Datça, à quelques encablures de l’île de Rhodes.
Les deux mesures effectuées par Pythéas à Marseille toutes deux au solstice d’été sont indépendantes. La mesure effectuée au solstice d’été, 120/41 et quatre cinquièmes, est plus précise ; elle conduit, avec l’obliquité de l’époque, à une latitude de 43°12’ au lieu de 43°18’ (temple de Diane) tandis que la durée du jour, 15 heures et 15 minutes, conduit à une latitude de 43°03’.
Sachant que pour Erastosthène la circonférence de la Terre était 252.000 stades, la dernière phrase de Strabon « Marseille est située à quelque 4.900 stades du parallèle qui passe par le centre de l’île de Rhodes et à quelques 30.300 stades de l’équateur. » conduit, par une simple règle de trois, à une latitude parfaite de 43°17’. Ce n’est ni Strabon, ni Hipparque, ni Eratosthène, ni Pythéas, ni personne qui a pu compter le nombre de pas entre Marseille et le parallèle de Rhodes. On imagine aisément qu’Erastosthène ou Hipparque qui avaient le livre de Pythéas sous les yeux ont su exploiter ce texte et y trouver par exemple la mesure de la longueur de l’ombre à l’équinoxe ou au solstice d’hiver ou les deux qui y figuraient certainement. Rappelons la phrase agressive, mais mi-élogieuse, de Strabon : « …y compris également tous les mensonges de Pythéas le Massaliote sur les pays en bordure de l’Océan, mensonges qu’il a su couvrir de sa science de l’astronomie et des mathématiques».
Aratos de Soles, -315-245, Phénomènes et Prognostics.
Bigourdan Guillaume, 1911, L’Astronomie Evolution des Idées et des Méthodes, Ed. Flammarion, pp. 80-81 et pp. 144-149.
Delambre Jean-Baptiste, 1817, Histoire de l’Astronomie Ancienne, tome premier, Hipparque, pp.109-110.
Eudoxe de Cnide, -408-305, Katoptron, miroir, dans Commentaires d’Hipparque, voir Delambre.
Strabon, -58+23, Géographie Livre II, 5, 41, p.122 Editions les Belles Lettres, 1969, Commentaires de Hans Mette et Germaine Aujac, pp. 172-173.
*Eudoxe avait établi un système de 27 sphères concentriques et mobiles permettant de prévoir le mouvement du Soleil et de la Lune dans le zodiaque ainsi que les stations de Mercure et de Vénus et les rétrogradations de Mars, Jupiter et Saturne.
*Calcul effectué avec l’obliquité de l’époque 23°44’, une durée de 14h 38m pour « 14 presque 2/3», et une sous-correction de deux minutes en raison de la réfraction atmosphérique, inconnue avant Képler.