Pythagore : les deux mouvements du soleil (de la terre)




Les deux mouvements du soleil : alternance des jours et des nuits et alternance des saisons. Images photodenature.fr

Le Soleil ne suit jamais exactement la même orbite : il tourne sur une orbite basse au solstice d’hiver…monte sur des orbites de plus en plus hautes en hiver et au printemps… il culmine au solstice d’été… et redescend sur des orbites de plus en plus basses en été et à l’automne.
365 cercles qui s’enchaînent sans se reboucler.
Un mouvement apparent « en hélice » c’est le terme que les Grecs employaient jusqu’à Pythagore et Platon.

En apparence…des «rotations» journalières qui s’enchaînent avec «une montée et une descente sinusoïdales»saisonnières, entre 2 limites lors des solstices. 

En apparence c’est un mouvement apparent continu autour de l’axe polaire. 

Un peu l’escalier de Chambord à double hélice, avec des marches plus hautes dans les étages intermédiaires - les jours allongent plus vite aux équinoxes - et qui s’aminciraient à l’approche des deux paliers extrêmes. Et redescente pendant les 6 mois suivants par l’autre escalier. 




Averroès, ici furtivement caché derrière Pythagore, se contentait encore de cette interprétation « en hélice » : elle sauve les apparences… et elle suffit pour prévoir la position du soleil : les heures, les jours et les saisons… nécessaires aux travaux des champs et aux activités sociales et domestiques… mais ce type de mouvement à la fois « hélicoïdal…et…sinusoïdal » n’existe pas dans la nature. 

Raphaël a raison de rappeler que 17 siècles plus tôt Pythagore avait aussi sauvé les apparences... …prévu le calendrier, mais mieux encore il avait… compris la réalité profonde qui se cache derrière : 

« la combinaison de deux mouvements circulaires et uniformes, l’un diurne, d’Orient en Occident, sur l’équateur, autour du pôle céleste, l’autre annuel, d’Occident en Orient, sur l’écliptique, autour d’un deuxième pôle, décalé de 24°environ »

Ce deuxième cercle s’appelle « l’écliptique » parce que c’est le lieu des éclipses.


Voici comment on enseignait autrefois la combinaison de ces deux mouvements circulaires pour le certificat d’études. J’ai rencontré plus tard des agrégés tout étonnés et qui avouaient une difficulté de compréhension de ce type raisonnement. C’était juste après la guerre, en classe de 8e(CM1), dans Brest bombardé et en ruines, dans des baraques provisoires où la pluie brestoise coulait parfois goutte à goutte jusque sur nos tables. L‘institutrice portait la coiffe de Landerneau, et des sabots noirs vernis à talons. Elle se campait aristocratiquement dans un magnifique châle noir brodé. 

« La Terre, disait-elle, fait un tour sur elle-même en 23 h et 56 minutes » (heureusement pour nous, elle nous faisait grâce de 6 secondes). Un tour c’est 360°, c’est revenir à un point fixe : les étoiles. « Au bout d’une année la Terre a fait 366 tours 1/4, mais en même temps elle a effectué 1 tour en sens inverse autour du Soleil, il s’est écoulé 365 jours 1/4». Sur l’ardoise il fallait multiplier 4 minutes de retard par jour par 365 jours, diviser par 60 pour passer en heures, et au final trouver 24 heures pour avoir une bonne note ce jour là.
Le Soleil prend 4 minutes de retard chaque jour sur les étoiles fixes.
Mêmes raisonnements pour la Lune et pour les planètes. La Lune effectue un tour en 27,32 jours c’est sa période sidérale qui marque son retour devant la même étoile. La Lune revient en moyenne tous les 29, 53 jours devant le Soleil, un rendez-vous synodique à chaque Nouvelle Lune. 




« La Grèce voit le divin dans ce qui est harmonieux et clair »,
Ernest Renan. 

Le génie Grec, si sensible à la beauté, fut séduit par la combinaison de ces deux mouvements : circulaires dans l’espace, perpétuels dans le temps

  • …une rotation journalière sur l’équateur, qui explique l’alternance des jours et des nuits
  • …une circulation annuelle le long l’écliptique…en oblique…qui explique l’alternance des saisons.
  • Platon ne tarissait pas d’éloges. 


Aristote, partisan acharné d’une Terre immobile au centre et souvent méprisant pour ceux d’Italie, reconnaissait aux Pythagoriciens cette magnifique démonstration : « si la Terre tourne, elle doit avoir deux mouvements de rotation ». Aristote avait raison, une rotation unique était insuffisante pour expliquer l’ensemble des phénomènes observés.

« Et pourtant elle tourne… » est une réplique de théâtre. Galilée ne l’a jamais prononcée. Ces théologiens pouvaient-ils comprendre que la rotation générale des astres… en fait celle de la Terre sur elle-même … se combinait avec une circulation des planètes le long de l’écliptique ? … 

Et que dire de la rétrogradation de Mars, Jupiter et Saturne ?… de l’élongation maximale de Mercure et de Vénus ?…de la variation d’éclat de Mars ? Galilée, 20 ans avant son procès, avait écrit : « Il faut vraiment n’avoir jamais regardé le ciel », un véritable cri du coeur. 

A la fin de sa vie Platon aurait écrit « la Terre tourne en s’enroulant »… on sent bien que dans cette phrase il évoque deux mouvements. Les hellénistes, sur fond de prétérite ou d’aoriste, se sont déchirés sur cette traduction. Une traduction plus explicite, « la Terre tourne sur elle-même en s’enroulant autour du Soleil », ferait de Platon le premier héliocentriste. 




Sur cette huile sur bois de Juste de Gand, Ptolémée tient une sphère armillaire avec ses méridiens et ses parallèles. Le bandeau en oblique, est l’écliptique. Les planètes y circulent lentement au cours de l’année. Vous ne verrez jamais le Soleil, ni la Lune, ni les autres planètes dans la petite Ourse, ni dans la grande Ourse, ni dans la Croix du Sud, elles circulent pour l’éternité devant les 12 constellations du zodiaque

 Si on fait tourner sagement cette sphère armillaire autour de son axe vertical, notre regard va être est attiré par le bandeau en oblique de l’écliptique qui va tourner tout de guingois, à angle constant, comme un cerceau qui tomberait à terre, avec ce mouvement-ci… que la main de Ptolémée semble esquisser.